En septembre 2014, un litige a opposé TCYK LLC (TCYK étant le titre du film en anglais) au FAI Sky Broadband Ltd qui s’est soldé par un accord : Sky devait fournir à TCYK LLC le nom et les adresses de ses clients qui étaient suspectés d’avoir téléchargé le film sans permission.
Aussi, dans une lettre adressée à ses clients, Sky a avancé ceci : « nous nous devons de vous informer sur la décision de justice à l’endroit de Sky qui nous oblige à fournir vos noms et adresses à une autre entreprise.
Une entreprise connue sous le nom de TCYK LLC, qui possède les droits de plusieurs films, a prétendu qu’un certain nombre de clients Sky Broadband sont mêlés à un partage illicite de fichiers contenant certains de ses films. Pour appuyer ses allégations, TCYK LLC a avancé qu’il a réuni des preuves de comptes individuels de clients Broadband (identifiés en ligne par des nombres uniques appelés adresses IP) qui auraient partagé ce fichier.
Sky n’a pas participé à la collecte de ces éléments et ne peut pas faire de commentaire sur leur fiabilité. Cependant, TCYK LLC a obtenu une injonction de la Cour, ce qui signifie que Sky est tenu de fournir les noms et adresses de tous les propriétaires des comptes concernés. Étant donné que votre compte correspond à l’une des adresses IP identifiées, nous serons dans l’obligation de fournir vos noms et adresses à TCYK LLC.
Qu’arrivera-t-il par la suite ?
Il est probable que TCYK LLC vous contacte directement et vous demande de leur verser une compensation pécuniaire ».
Dans sa lettre aux clients incriminés, TCYK LLC reconnaissait néanmoins ne pas avoir de preuve qu’une personne spécifique avait lancé le téléchargement et visait donc la personne qui réglait la facture Sky Broadband : « dans le cas où vous n’êtes pas responsable de l’acte d’infraction commis plus haut parce que, par exemple, une autre personne de votre foyer aurait pu se servir de l’ordinateur, vous devez nous fournir la liste de toutes les autres parties dans votre résidence qui se servent de votre connexion internet pour rendre disponible le film. Une réponse non favorable pourrait conduire à une supposition que vous en êtes l’auteur ».
Cet exemple est une illustration de l’application de la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique qui tend à limiter la responsabilité des FAI. Ces derniers se voient dédouanés de ce que les utilisateurs font de l’accès qu’ils fournissent. Il est important de noter que la directive précise que ce régime « couvre tout service fourni, normalement contre rémunération, à distance au moyen d'équipement électronique de traitement (y compris la compression numérique) et de stockage des données, à la demande individuelle d'un destinataire de services ». Mais qu’en est-il si le service est gratuit ?
En Allemagne, s’est soulevée cette question sur la responsabilité d’un fournisseur dans la violation de droit d’auteur commise par un utilisateur. Maciej Szpunar, avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne, a donné son opinion sur un litige opposant Tobias McFadden, propriétaire d’un magasin de vente d’équipements audio, à Sony Music Entertainment, pour un problème de piratage.
Pour les besoins de son activité, Tobias propose l’accès gratuit au Wi-Fi. Une œuvre protégée par Sony a été téléchargée via cette connexion. En établissant le parallèle avec Sky Broadband, il est donc question de savoir ici si et à quel point un professionnel qui, dans le cadre de son activité, propose un accès gratuit au Wi-Fi, peut être tenu responsable pour les cas de piratage répertoriés sur ce réseau.
Sony a demandé à la justice d’obliger Tobias à verrouiller son accès Wi-Fi par un mot de passe et de réparer le préjudice subi. Si la justice allemande avait d’abord statué en faveur de Sony en janvier dernier, dans le cadre d’un recours, elle a sollicité la CJUE pour être éclairée, étant donné qu’elle avait des doutes sur l’application de la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique.
L’avocat général précise que trois conditions doivent être remplies pour prétendre à la limitation de cette responsabilité :
- le fournisseur de service ne doit pas avoir initialisé la transmission ;
- il ne doit pas avoir choisi le destinataire de la transmission ;
- il ne doit pas avoir choisi ou modifié l’information contenue dans la transmission.
Pour Szpunar, « bien qu’une injonction puisse être adressée à l’opérateur pour mettre un terme à l’infraction, il est impossible d’exiger la résiliation ou la protection par mot de passe d’une connexion internet ou même d’examiner les communications qui transitent par ladite connexion ».
« Je suis d’avis qu’imposer l’obligation de sécuriser l’accès au réseau Wi-Fi, en tant que méthode de protection du droit d’auteur sur internet, ne respecterait pas l’exigence d’un juste équilibre entre, d’une part, la protection du droit de propriété intellectuelle, dont jouissent les titulaires de droits d’auteur, et, d’autre part, celle de la liberté d’entreprise dont bénéficient les prestataires des services concernés », a indiqué l’avocat général.
Son avis n’est pas contraignant et les juges doivent encore rendre leur verdict.
Source : directive sur le commerce électronique, opinion de l'avocat général sur le cas d'espèce (au format PDF)
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