Le député socialiste Yann Galut a déposé ce matin un amendement, dans le cadre du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, dont l'objectif est d'obliger les grandes enseignes américaines du numérique à collaborer avec la justice.
« Nous sommes aujourd'hui confrontés à un vide juridique sur la question du chiffrement des données, qui bloque les enquêtes judiciaires. Il faut contraindre les constructeurs de smartphones et de tablettes, Apple et Google notamment, à fournir à la justice les codes pour l'exploitation du contenu de leurs appareils. C'est la raison de mon amendement », explique le député socialiste. En tant que rapporteur du projet de loi pour la commission des finances, le député socialiste propose de viser le portefeuille afin de contraindre ces entreprises à fragiliser le système de chiffrement qu’elles proposent à leurs clients, ou, le cas échéant, à forcer elles-mêmes leur système.
Aussi, il va confier les mesures répressives qu'il préconise en cas de refus d'obtempérer : « s'abstenir de répondre dans les meilleurs délais à une réquisition de la justice serait puni d'un million d'euros d'amende. C'est une somme qui peut paraître considérable, mais qui est à la hauteur du chiffre d'affaires des géants du numérique. Apple, Google, ces grands groupes extrêmement puissants ne peuvent être contraints que financièrement. Il ne s'agirait pas pour autant d'une punition d'exception. Pour d'autres délits — la corruption par exemple —, le Code pénal prévoit aujourd'hui des sanctions à cette hauteur ».
Cependant, s'il ne s'agit pas d'une punition d'exception, alors la loi ne pourrait pas se borner à viser uniquement les grandes enseignes américaines, mais bien tous les acteurs fournissant des moyens de chiffrement. De plus, à la lumière du cas d'Apple, il convient de se demander également s'il est techniquement possible de pouvoir coopérer. Des experts en sécurité estimaient par exemple que dans le cas concernant l'iPhone de l'auteur de l'attentat de San Berdardino, Apple était en mesure d'aider le FBI parce que le dispositif ne comportait pas d'enclave physique comme les modèles les plus récents.
Pour le député socialiste, le fait que des entreprises comme Apple ou Google mettent en avant la protection de la vie privée des citoyens relève de la mauvaise foi : « elles s'abritent derrière une soi-disant protection de la vie privée, alors qu'elles n'hésitent pas à faire une exploitation commerciale des données personnelles qu'elles recueillent. Sur ce thème-là, je trouve cela très paradoxal de les voir soudain s'ériger en modèles de vertu ».
Cependant, quand il lui a été demandé quels seraient les garde-fous en matière de protection de la vie privée dans le cas où l'amendement était adopté, il a répondu que « l'amendement respecte l'équilibre entre vie privée des consommateurs et besoin de sécurité. Le procureur ou le juge d'instruction ne pourront avoir accès à la clé de chiffrement des constructeurs de smartphones qu'avec l'autorisation du juge des libertés et de la détention. Par ailleurs, cette clé ne servira que pour le ou les portables concernés par la procédure judiciaire. La police et la justice ne disposeraient en aucun cas d'une clé générale qui leur donnerait le droit d'accéder aux données des téléphones portables de tous les citoyens ».
Or dans le cas qui fait l'actualité du moment, Apple a expliqué ne pas être en possession d'une quelconque clé de chiffrement constructeur. Raison pour laquelle, pour accéder au contenu de l'iPhone verrouillé, le FBI a demandé à Apple d'installer une version personnalisée du système d'exploitation iOS qui contournerait des fonctionnalités de sécurité importantes comme le mécanisme qui prévoit qu’après dix tentatives infructueuses pour déverrouiller le contenu du téléphone, ce dernier s’efface automatiquement. La question de savoir si une entreprise peut-être contrainte à pirater un de ses propres appareils dans le cadre d'une enquête se pose encore avec plus de force.
Source : le Parisien
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Le , par Stéphane le calme
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