Voici aujourd’hui près d’un an et demi que Google procède à la suppression dans ses résultats de recherche de certaines informations sensibles concernant des internautes européens.
Ces suppressions sont effectuées dans le cadre du « droit à l’oubli ». Dans une décision rendue en mai 2014 suite au procès Google Espagne contre l'AEPD et Mario Costeja González, la Cour de justice de l'Union européenne a stipulé que les internautes ont le droit de demander aux moteurs de recherche tels que Google de supprimer certains résultats les concernant et pouvant porter atteinte à leur vie privée. La Cour a par ailleurs décidé que les moteurs de recherche devaient évaluer les demandes de suppression envoyées par chaque individu et qu'ils ne pouvaient continuer à afficher certains résultats de recherche que s'ils présentaient un intérêt pour le public.
Aussi, les moteurs de recherche se doivent d’évaluer la pertinence des demandes de suppression envoyées par chaque individu. Le but étant de trouver un juste équilibre entre la protection de la vie privée des individus et le droit du public à accéder à ces informations et à les diffuser.
De ce fait, Google se réserve le droit de ne pas répondre favorablement à certaines demandes, s’il estime que les informations présentent un intérêt public, « par exemple, si elles concernent des escroqueries financières, une négligence professionnelle, des condamnations pénales ou une conduite publique adoptée par un fonctionnaire ».
Fin novembre, Google a rendu disponibles les statistiques relatives aux demandes de suppression de résultats de son moteur de recherche sur le continent européen. Si la France était déjà le pays d’où provenaient le plus grand nombre de demandes selon les statistiques de mai, sa position demeure inchangée.
En France, le nombre total d'URL dont la suppression a été demandée par des personnes en lien avec ce pays est désormais de 247 040 (contre 174 311 URL en mai dernier) pour 73 700 demandes au total (contre 51 873 en mai dernier). Comme en mai, près de la moitié des URL ont été supprimées, soit 101 552 URL.
L’une des demandes reçues dans l’Hexagone provenait d’un prêtre condamné pour possession de pornographie enfantine qui a demandé à ce que soient retirés des articles portant sur sa peine et son bannissement de l'Église. Google indique ne pas avoir supprimé les pages correspondantes des résultats de recherche.
En seconde position vient l’Allemagne dont les 60 412 demandes de suppression concernent désormais 221 291 URL. Ici également, près de la moitié des URL ont été supprimées, soit 92 212 URL.
La Grande-Bretagne occupe la troisième position avec un nombre total d'URL dont la suppression a été demandée par des personnes en lien avec ce pays qui se chiffre à 162 747 pour 43 234 demandes. Ici, près de deux URL sur cinq ont été supprimées, soit 51 685. En Grande-Bretagne, un professionnel des médias a demandé à Google de supprimer quatre liens vers des articles relatifs au contenu embarrassant qu'il avait publiés sur Internet, il n’a pas obtenu gain de cause. De même pour la personne qui a demandé à Google de supprimer les liens vers des articles sur Internet qui font référence à son licenciement pour des crimes sexuels commis dans le cadre de son activité professionnelle.
A contrario, le médecin qui a demandé à Google de supprimer plus de 50 liens vers des articles de journaux concernant une intervention mal exécutée a vu Google supprimer des résultats de recherche trois pages qui contenaient des renseignements personnels sur lui, mais ne mentionnaient pas l’intervention. Les autres liens concernant l’incident quant à eux figurent toujours dans les résultats de recherche. De même pour la personne qui a demandé à voir supprimé un lien vers un résumé d'actualité reprenant les décisions d'un magistrat local qui incluaient un verdict de culpabilité à son encontre. Étant donné que dans le cadre de la loi de réhabilitation des délinquants au Royaume-Uni cette condamnation a été levée, Google a supprimé des résultats de recherche la page comportant son nom.
Les sites les plus affectés par ces demandes de suppression sont Facebook (10 257 URL supprimées), Profileengine.com (8007 URL supprimées) et Groups.google.com (6769 URL supprimées). Google précise que, sur le nombre total d'URL ayant fait l'objet d'une demande de suppression dans les résultats de recherche, les 10 principaux sites ci-dessous représentent 9 % des URL supprimées.
Il faut rappeler que l'autorité française de contrôle de protection des données et Google se livrent une bataille acharnée sur l’extension de ce système de requête. Google pour sa part estime que l’enjeu est d’empêcher les liens incriminés d'apparaître sur les versions européennes du moteur de recherche (donc si une URL se voit supprimée après une demande faite dans un pays européen, elle continuera d'être affichée via une recherche faite ailleurs comme sur google.com). L’argument de Google est que seulement 3 % des internautes français utilisaient des versions extraeuropéennes de son moteur. Raison pour laquelle, dans un billet publié le 30 juillet dernier, l’entreprise a avancé par le biais de Peter Fleischer, le juriste de Google chargé de la vie privée, que « contestons par principe l'idée qu'une seule agence nationale de protection des données personnelles puisse déterminer à quelles pages Web les personnes situées dans des pays étrangers peuvent avoir accès via les moteurs de recherche ». Il a également rappelé que « si le droit à l’oubli est désormais une loi en Europe, ce n’est pas une loi à l’échelle mondiale. De plus, il y a de nombreux exemples dans le monde qui montrent que le contenu déclaré illégal de par les lois d'un pays peut être légal dans d’autres ; la Thaïlande condamne certains propos portés à son Roi qui sont critiques (…) la Russie condamne certains propos qui sont reconnus comme étant une « propagande à l’homosexualité ».
Source : rapport de transparence Google, billet Peter Fleischer
Google publie les statistiques relatives au « droit à l'oubli »
La France reste en tête des pays les plus demandeurs
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Le , par Stéphane le calme
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