L’un des objectifs du HTML5 étant de mettre fin à l’utilisation des outils tiers comme Flash ou Silverlight sur le Web, un lobbying constitué de Microsoft, Google et Netflix avait proposé au W3C l’API EME (Encrypted Media Extensions) pour le support du contenu vidéo protégé dans le navigateur.
La proposition avait été validée par le W3C, qui avait approuvé en début de ce mois les DRM dans la charte du groupe de travail HTML ; ce qui signifie qu’EME pourrait être intégrée comme une partie du standard HTML 5.1, si les travaux de normalisation se déroulent bien.
Un choix qui avait été vertement critiqué par plusieurs organismes, notamment l’Electronic Frontier Foundation (EFF), qui estime que cela pourrait ouvrir la voie à d’autres restrictions, qui au final pourraient entrainer la fermeture du Web, au point qu'il ne sera plus possible de consulter le code source d’une page, copier/coller du texte, le navigateur ne pourra plus « enregistrer sous » une image, JavaScript sera scellé dans une tombe opaque et on ne pourra plus voir le script, etc.
La fondation Mozilla, autre précurseur du Web ouvert, vient de prendre position dans cette affaire. Brendan Eich, cofondateur et président de Mozilla, s’est attaqué violemment au projet EME, dans un billet de blog intitulé « The Bridge of Khazad-DRM » (en référence au « Pont de Khazad-dûm », dans le chapitre 5 du Seigneur des anneaux, ou Gandalf affronte le Balrog).
Pour Mozilla, les DRM sont hostiles aux utilisateurs, aux logiciels open source et aux éditeurs de navigateurs. « L’API EME introduit de nouveaux plugins qui ne sont ni Silverlight, ni flash, appelés modules de décryptage de contenu (CDM) dans HTML5. Nous voyons des sérieux problèmes à cette approche. La première étant le fait que le W3C ne précisera pas le CDM, de sorte que chaque navigateur pourra avoir son propre CDM », écrit Brendan Eich.
Mozilla précise qu’il n’est pas contre la lecture du contenu vidéo sur le Web. L’organisme rappelle qu’il a déjà pris en charge des plugins avec leur propre système de DRM propriétaire. Il s’oppose juste au choix du W3C de ne pas préciser la forme exacte du CDM à utiliser. Ce pourrait entrainer plusieurs problèmes et incompatibilités.
Brendan Eich précise enfin dans son billet de blog pourquoi les DRM sont nuisibles pour les utilisateurs, l’open source et les éditeurs de navigateurs :
- les utilisateurs : les DRM sont techniquement une contradiction qui même directement à des restrictions. Ce qui est contre l’utilisation équitable du Web et les intérêts des utilisateurs ;
- l’open source : les projets open source (notamment mozilla.org) ne peuvent pas mettre en place une solide boite noire CDM conforme avec Hollywood ;
- les éditeurs de navigateurs : Mozilla compare les CDM avec la période ou ActiveX de Microsoft était populaire (différent pour chaque OS et peut être même disponible uniquement sur le navigateur par défaut de l’OS).
« Voici un pont étroit (N.D.L.R : discussion sur les DRM au sein du W3C) sur lequel il faut se tenir debout et se battre – et peut-être tomber, mais (comme Gandalf), nos idées vivront encore. Il y aura d’autres situations où le monde aura besoin de Mozilla », conclut Brendan Eich.
Source : Mozilla
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