Une décision prise de façon autonome par Torvalds qui montre le caractère radical de celui-ci dans la prise de certaines décisions concernant le développement du Kernel.
Quand il faut s’exprimer, Torvalds n’a pas la langue dans la poche et ne ménage pas sa colère lorsqu’il s’agit du code de Linux. On se rappelle le fameux « fuck you! » adressé à NVIDIA pour l’incompatibilité du matériel de la société ou encore la violence verbale contre un développeur de Red Hat pour avoir proposé un patch pour le support du Secure Boot dans le Kernel.
Une attitude qui agace certains développeurs de la communauté Linux. Une discussion sur la liste de diffusion du noyau (LKML) s’est rapidement transformée en polémique, car un développeur qui en avait marre du comportement de Torvalds n’a pas hésité à critiquer celui-ci.
La source de la discorde : un bogue dans la RC de la version 3.11 du noyau pour les architectures x86, à cause de l’inclusion d’un patch d’une branche maintenue par le développeur Greg Kroah-Hartman, qui n’avait visiblement pas été testé au préalable. Torvalds, très en colère, n’a pas hésité à traiter celui-ci de lèche-botte dans la gestion des patchs, tout en invitant celui-ci à être « dur avec ses collaborateurs ». « Vous devez apprendre à crier au peuple », a-t-il écrit.
Sarah Sharp, programmeuse Linux chez Intel, en charge de l’USB 3.0 et dont les patchs pour le noyau sont transmis à Greg Kroah-Hartman, a été outrée par ces commentaires et s’oppose à « la violence verbale et la tyrannie de Linus Torvalds ».
« Sérieusement les gars ? Avons-nous besoin de cela pour améliorer et stabiliser Linux ? Linus Torvalds préconise l’intimidation physique et la violence verbale. La violence qu’il s’agisse de menace verbale ou d’abus de langage est inacceptable. Restez professionnels sur les listes de diffusion », écrit Sarah Sharp.
Elle appelle à des discussions lors du prochain Linux Kernel Summit pour améliorer l’environnement de travail sur le noyau et forcer Torvalds à se confronter à des personnes en face. « On pourra au moins se crier dessus en direct. Ouais, essayez de me crier dessus à ce sujet. Je rugirai en retour, plus fort, pour tous ceux qui perdent leur voix lorsqu'ils se font houspiller par les principaux responsables du maintien du noyau. Je ne serai plus la fille gentille », écrit-elle.
Une attaque directe qui a été balayée du revers de la main par Linus Torvalds, pas prêt à changer son attitude. « Si tu veux que j’agisse en professionnel, je ne suis pas intéressé », rétorque le père du Kernel, avant de continuer. « Je suis assis dans mon bureau en peignoir. De la même façon que je ne vais pas me mettre à porter des cravates, je ne vais pas me mettre à la fausse politesse, aux mensonges, aux politiques de bureau, à l’agressivité passive et aux coups bas ».
La discussion houleuse sur LKML s’est poursuivie avec d’un côté Sharp soutenue par quelques développeurs qui veulent du changement d’un Linus Torvalds, qui en réponse ne faisait que défendre son ego.
« Honnêtement, je méprise être subtile. Les gens ont besoin de savoir ma position sur les choses, je ne peux pas simplement dire "s’il vous plait faites pas cela", parce que personne ne va écouter », écrit Torvalds. « (…) il est vraiment difficile de comprendre les gens par e-mail, je pense que vous devez être plus ouvert et plus honnête lorsque vous communiquez par e-mail. Je suis généralement plus agréable en personne. ».
« Vous êtes l’un des pires contrevenants lorsqu’il s’agit d’injurier les gens et déchirer publiquement leurs émotions », s’oppose Sharp, qui invite dans un billet de blog les développeurs à prendre la parole contre la « violence verbale » des responsables du maintien du noyau Linux en particulier Linus Torvalds.
Sharp a reçu beaucoup de soutien sur Twitter des développeurs, dont bon nombre espèrent que cette discussion permettra de rendre l’écosystème Linux moins hostile pour ceux qui veulent proposer des correctifs pour le noyau.
La discussion complète sur LKML
Et vous ?
Que pensez-vous de l’attitude de Linus Torvalds ?
Ses excès sont-ils justifiés pour la pérennité du Kernel ?
La violence verbale est-elle le meilleur moyen pour gérer un projet d’une telle ampleur qui regroupe un nombre important de développeurs ?
L’écosystème Linux est-il hostile pour les développeurs qui proposent des correctifs ?