Bonjour,
L’administration française se trouve souvent dans des situations impossibles et les décisions prises au plus haut sommet entrainent des dépenses pour des raisons de diminution des coûts.
Un exemple simple un établissement local se dote d’un SI, pour réduire ces coûts de fonctionnement. Pour cela, les bonnes pratiques voudraient qu’on étudie bien le besoin, qu’on fasse des spécifications générales, puis des spécifications détaillées.
Ces spécifications servant alors de base à un appel d’offres. Une administration n’a pas le droit de passer un marché directement.
Mais voilà. Cet établissement sait, que le temps que le marché soit passé, que les développements soient faits et testés. Il est susceptible de subir plusieurs changements de règlementations.
Il ne peut pas passer un marché sur ses spécifications, car s’il le fait le produit sera à coup sûr obsolète avant sa réalisation.
Mais il a tout de même besoin de faire ce développement.
La seule solution qu’il lui reste est donc de passer un appel d’offres pour du développement (des heures de dev). Sans cadre, sans spic, avec qu’un minimum de contrôle qualité, vu que ne disant pas ce qu’il faut développer il ne peut pas dire ce comment sera vérifié la qualité.
C’est ainsi que très souvent les marchés juteux sont passés. C’est extrêmement pervers. Car non seulement le marché n’est pas cadré par le besoin, mais en plus il est quasi impossible d’y introduire des règles strictes. Du coup les prestataires dégagent leurs responsabilités en mettant en avant les termes du marché. Et ce qui normalement devrait être corrigé par le prestataire devient une évolution. Le prestataire a donc tout intérêt à saper le boulot (dans la limite des termes du marché) pour récupérer des avenants pour corriger les erreurs (volontairement*?) commises. Ainsi un développement peut voir sa facture multipliée par deux ou trois.
À la fin du marché l’établissement se retrouve avec un tas de spaghetti qui ne fonctionne que partiellement. Et il n’existe aucun autre acteur sur le marché pour prendre la suite. Ou alors à des coûts exorbitants (reprise de l’existant).
On pourrait penser que si un prestataire est si mauvais il ne sera pas repris. Mais la loi interdit de juger une réponse à un appel d’offres en tenant compte des prestations précédentes.
Autre effet pervers du fonctionnement des marchés public. L’établissement doit acheter un logiciel. Il fait un appel d’offres. Dans cet appel il doit donner la façon dont seront jugées les offres (systèmes de points). Dans ce cahier il y a une partie technique, qualité et financière.
Si l’établissement met en place un cahier qui marginalise la partie financière, l’appel ne sera pas lancé, car contraire à la loi.
Du coup, les grosses boites en profitent pour faire des propositions à des coûts dérisoires (quelques centaines de Millon d’euros) dans le même temps elles font en sorte que leur produit une fois installé et opérationnel soit incontournable. (ça couterait plus cher de changer que de continuer, sachant qu’on ne peut l’écarter dans l’appel suivant sous peine de poursuites)
Une fois le marché arrivé à terme, le coût de la maintenance est lui énorme. Vu que le fabricant est souvent le seul à pouvoir répondre. Soit il ne répond pas. Soit, il répond avec des coûts hallucinants. Le marché est caduc. Un appel doit être relancé. Et on assiste au même résultat. Pour finir l’administration ne pouvant pas se passer de cette maintenance on passe par un marché négocier. Et là, on voit apparaitre les pièges du système. Le renouvellement de licence «*Site*» dévie une licence par «*core*» (de proc) ou par «*user*». Les coûts de maintenance sont d’un facteur*10 par rapport au marché initial.
Pour vous donner un ordre d’idée récemment sur un logiciel le coût de la licence par core était de l’ordre de 100*000*€ pour 4 machines x 32 Proc x 4 core pour la prod +*2 machines x 32 Proc x 4 core pour la preprod, 2 machines x 16 Proc x 4 core pour la recette et le test de charge. Alors que la licence site était de 500*000*€ pour le tout.
Je caricature à peine. Ce que je viens de décrire je l’ai vécu plusieurs fois.
Les coûts vous paraissent énormes, mais pour tous ceux qui travaillent en entreprise il vous faut changer d’échelle. Dans beaucoup d’administration, nos unités de mesure sont bien différentes.
Par exemple l’édition des feuilles de salaires est un point simple qui pour une entreprise même grosse ne présente pas de grosse difficulté.
Mais lorsqu’on édite tous les mois 2,5 millions de bulletins, l’affaire et tout autre.
Passer d’une licence site à une licence par user lorsqu’on a 10*000 employés on trouve ça amer. Mais que dire de nos établissements de 100*000 ou 200*000 employés*?
voici quelques ordres d’idée pour un établissement de santé publique
Plus de 7 millions de patients pris en charge et plus de 1 million de patients accueillis aux urgences chaque année
5 millions de consultations externes
1.2 million de séjours
1.1 million de passage aux urgences
1 urgence toutes les 30 secondes
Près de 38*000 naissances
Plus de 1200 greffes d’organes
Plus de 200*000 actes de chirurgie
Autre exemple dans le milieu médical. Suite à un changement de logiciel pour un petit hôpital avant la mise en service, il était nécessaire de faire une reprise des données. Uniquement, importez les dossiers administratifs des patients pour lesquels au moins une opération administrative a eu lieu dans l’année. J’ai entendu un ingénieur passer rapidement sur ce point lors d’une réunion en disant que la reprise se ferait dans la nuit précédant le lancement. Alors que j’étais resté silencieux durant toute la réunion, j’ai posais une simple question*: «*Avez vous une nuit de 832 heures*? Car c’est le temps minimal en flux tendu pour faire cette opération.*»
Tout ça pour vous dire qu’il faut mettre les chiffres en façon de ce qu’ils représentent.
Y a-t-il des points d’amélioration*?
Oui bien sur. Il y en aura toujours. Par exemple mettre à disposition des établissements des experts compétents pour les aider à rédiger les appels d’offres et à les dépouiller.
Faire prendre conscience aux établissements que même s’ils sont autonomes en termes financiers et décisionnels, travailler ensemble, mettre dans un pot commun ce que l’on a fait est bon pour tous.
Le logiciel libre est-il une réponse*?
NON. En tout cas pas aujourd’hui. (le prix d’un ETL libre d’une société française bien connue et le même que celui d’une Buziness Machine par exemple)
Il faut prendre le logiciel libre au même titre que n’importe quel autre. Tant qu’on est dans des fonctions de base. Le logiciel libre est très attractif. Lorsque comme bien souvent dans les administrations le besoin devient plus ciblé. On se retrouve avec une seule boite qui propose un produit et qui n’a pas l’envergure pour supporter une telle masse.
Linux à la place de Windows*?
NON et cette réponse n’a rien à voir avec la qualité, mais avec le prix.
Acheter des lots (10*000) PC avec ou sans Windows c’est le même tarif.
Acheter un logiciel métier qui fonctionne sous Linux. Les constructeurs n’en proposent pas. Dans plus de 90*% des cas que je vois, les outils de travail sont pilotés uniquement par des softs sous Windows. J’ai même vu des outils libres avec le PC et Windows. Et si on installe quoi que ce soit sur le PC, la garantie tombe non pas pour le PC, mais pour l’ensemble. Je vous laisse imaginer le Pb lorsqu’il s’agit d’un outil à plusieurs millions d’euros.
Mais Linux est très présent dans les administrations. Quasiment tous les serveurs Unix sont des Linux dans les salles blanches.
Je vous dis donc relativisez, eh oui il y a des choses à faire.
A+JYT
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