Mise à jour du 07/12/10
Wikileaks est en train de passer du statut de site polémique à celui de site traqué.
Une position qui, habituellement, attire de multiples sympathies dans la sphère d'Internet.
Et Wikileaks ne fait pas exception. De nombreux internautes, y compris ceux qui n'adhèrent pas spécialement à la philosophie du site, ont décidé de réagir aux tentatives visant à le mettre hors-ligne.
Il existe par exemple à présent de nombreux miroirs (et donc d'hébergeurs volontaires) qui permettent d'accéder aux contenus du site. Un torrent, accessible depuis la page de Wikileaks, permet également de distribuer son contenu sur les réseaux Peer-to-Peer.
Face aux pressions, PayPal, et aujourd'hui MasterCard, ont annoncé qu'il stoppait les possibilités de dons au site. Résultat, les cyber-attaques se multiplient contre ces prestataires de paiements.
De son coté, The Pirate Bay, annuaire de Torrents, appelle les internautes à fermer tous leurs comptes PayPal. Une demande qui s'inspire et qui fait suite à celle d'Eric Cantona de mettre les banques à bas en retirant ses liquidités.
Les banques sont d'ailleurs au centre de cette nouvelle action – visiblement coordonnée - contre Wikileaks. La banque postale suisse vient en effet de geler les avoirs de Julian Assange, le créateur recherché du site. Post Finance a également décidé de bloquer le compte où étaient déposés les dons de soutien à Wikileaks. Motif invoqué, Julian Assange n'a pas donné sa véritable adresse (mais celle de ses avocats).
En France, c'est OVH, l'hébergeur de sites Web, qui est au coeur du cyclone. Après la demande d'Eric Besson, ministre chargé de l'Industrie, de l'Énergie et de l'Économie numérique, d'empêcher l'hébergement de Wikileaks sur des serveurs français, la société avait saisi la justice vendredi.
Aujourd'hui, Octave Klaba, PDG d'OVH, fait à nouveau le point sur cette situation complexe dans un communiqué. Voici les principaux extraits de cette longue lettre ouverte :
« Ovh n'est ni l'hébergeur, ni l'éditeur du site.
Ovh n'est ni pour ni contre wikileaks.
[…] Le monde politique a montré du doigt Ovh comme le responsable de l'hébergement de ce site. Habituellement, la loi LCEN prévoit une obligation de notification du contenu manifestement illicite avec un fondement juridique. Nous en recevons 3 à 5 notifications par jour pour différentes pages parmi les
6'500'000 sites qu'on héberge sur notre réseau (propos racistes, xénophobie, etc) et nous les transmettons aux hébergeurs concernés. [...] Concernant le site wikileaks, à ce jour, nous n'avons reçu aucune notification à transmettre à notre client. Peut être lui, en a-t-il reçue une directement. Ça, on ne le sait pas. En tout cas, Ovh n'a rien reçu.
Vu les accusations et la position délicate dans laquelle Ovh s'est retrouvé, nous avons décidé de demander l'avis de la justice pour savoir si le site ou certaines pages du site sont manifestement illicites. Pour cela, nous avons décidé d'utiliser la procédure sur requête qui permet de demander l'avis d'un juge rapidement et sans discussion contradictoire. Nous n'avons pas fait la procédure en référé, car elle demande qu'une partie assigne en justice une autre partie. En suite seulement le débat contradictoire peut avoir lieu et le juge peut se prononcer.
Comme Ovh n'est ni pour ni contre ce site, nous n'avons pas à assigner notre client.
Vendredi donc à 16h, nous avons fait une demande très très rapide auprès du TGI de Lille. Elle a été rejetée avec les motivations suivantes : "Rejetons la demande, la société Ovh ne justifiant pas de la nécessite pour elle d'obtenir une autorisation judiciaire pour suspendre l'hébergement du site internet". Ceci parce qu'1 heure pour préparer la requête c'est peu et donc nous avons simplifié la requête au maximum en stipulant qu'Ovh était l'hébergeur du site (ce qui n'est pas le cas, mais ça permettait de la faire dès vendredi). Le juge s'est prononcé à 17h30...
Donc, nos avocats ont travaillé tout le week-end pour préparer une requête complète avec toutes les pièces nécessaires. Cette requête a été présentée et plaidée aujourd'hui auprès d'un juge au TGI de Lille et un autre de Paris en même temps. Le juge de Lille a confirmé sa décision de Vendredi. […]
Le juge de Paris a dit que l'affaire était complexe et a demandé que le requête soit plaidée au près du premier Vice-président du TGI de Paris. Ça a été fait. Il était d'avis que notre demande devait être rejetée mais a demandé l'avis du Président du TGI de Paris qui lui n'était pas de cet avis, et ce dernier a renvoyé le dossier auprès du 1er juge qui lui après réflexion a rejeté notre demande au motif qu'un tel dossier nécessitait un débat contradictoire.
[…]
Ces décisions sont conformes à ce que nous attendions ...
Dans l'état actuel des choses, il y a plusieurs scenarii:
- conformément à la loi LCEN, il faut que "quelqu'un" fasse une notification de contenu manifestement illicite auprès de l'hébergeur en la justifiant avec les fondements légaux pour que ce dernier procède au retrait de ce contenu.
sinon il faut que "quelqu'un" assigne en référé notre client (l'hébergeur et lui pourra éventuellement assigner son client Wikileaks en sa qualité d'éditeur). Une discussion contradictoire pourra avoir lieu et le juge pourra se prononcer.
- sinon il faut que "quelqu'un" saisisse les juges de référés et demande de censurer le site sur le territoire français.
C'est une procédure vraiment exceptionnelle. Il y a un précédent dans l'histoire de la justice avec l'affaire relative au site "aaargh". Avec les sites sur les jeux, cette procédure commence à être utilisée.
Au niveau d'Ovh, le prestataire technique, nous estimons avoir fait le maximum pour clarifier la situation juridique du site par rapport à Ovh. En tout cas, nous avons essayé d'être le plus transparent possible.
Ovh exécutera toute décision de justice qui lui sera communiquée ».
Et de conclure : « Cette affaire qui dépasse les États, nous dépasse aussi et très largement ».
Visiblement très affecté par cette affaire, Ovh se refuse à tout commentaire supplémentaire et le regrette officiellement.
Une décision que l'on peut comprendre vue la tournure des événements qui mélangent de plus en plus finances, politique, diplomatie, mœurs et IT.
Dernière information qui vient de « tomber » : suite la demande de la Suède, la police Britannique vient, ce mardi, d'arrêter Julian Assange. Pour "crime sexuel".
Officiellement.
Sources : Communiqué de presse sur le gel des avoirs du créateur de Wikileaks, Page de PirateBay, Communiqué de l'arrestation de Julian Assange
Wikileaks : le créateur du site arrêté
Et ses avoirs gelés, les cyber-militants s'organisent et OVH s'exprime dans une nouvelle lettre ouverte
Wikileaks : le créateur du site arrêté
Et ses avoirs gelés, les cyber-militants s'organisent et OVH s'exprime dans une nouvelle lettre ouverte
Le , par Gordon Fowler
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