Un certain nombre de développeurs ont pris Twitter d’assaut pour attirer l’attention des professionnels, en particulier des recruteurs, sur le processus d’entrevue qui peut s’avérer éreintant dans leur domaine et repose fortement sur des questions techniques.
David Heinemeier Hansson, un développeur danois père du framework web Ruby on Rails et du wiki Instiki, avait fait allusion à cette pratique des recruteurs dans ce qu’il a appelé « l’algorithme de bizutage du tableau blanc », étape de l’entretien d’embauche où les candidats sont mis à rude épreuve avec des questions techniques.
Ce style d'entrevue, largement utilisé par les grandes entreprises technologiques, notamment Google et Amazon, consiste généralement à mettre les candidats face à un tableau blanc sans qu’ils n’aient accès à un matériel de référence, scénario de travail que des développeurs ont qualifié de démoralisant, mais aussi de test irréaliste de la capacité réelle.
C’est David Heinemeier Hansson qui a ouvert le bal en déclarant : « bonjour, je m’appelle David. Je ne parviendrais pas à écrire un tri à bulles [ou tri par propagation : un algorithme de tri qui consiste à comparer répétitivement les éléments consécutifs d'un tableau, et à les permuter lorsqu'ils sont mal triés]sur un tableau blanc. Je cherche du code sur Internet tout le temps. Je ne fais pas d'énigmes ».
En guise de réponse à son Tweet, certains développeurs ont suivi le ton de cet « aveu ». Comme l’ingénieur Tim Dierks qui a déclaré « bonjour, je m'appelle Tim. Je suis un responsable d’équipe chez Google avec plus de 30 ans d'expérience en développement, pourtant j'ai besoin de chercher comment obtenir la longueur d'une chaîne Python ».
Ou encore le développeur Lukas Kollmer qui a déclaré « bonjour, je m’appelle Lukas. J’écris du code Objective-C depuis près de 8 ans, mais pourtant j’ai toujours besoin de chercher la syntaxe objc block sur Google ».
Même son de cloche chez un autre développeur qui a déclaré « bonjour, mon nom est Bruce. Je développe en Clojure depuis 7 ans déjà et j’ai toujours copié et collé les déclarations des espaces de noms, puis je les ai changées ».
« Le seul monde où vous auriez besoin de pouvoir vous souvenir d'un algorithme serait un monde post-apocalyptique, où les disques durs de tous les ordinateurs connectés à Internet seraient grillés et toutes les copies de documents universitaires fondamentaux et de manuels d'informatique auraient été réduits en cendres », a estimé le professeur Quincy Larson dans un billet de blog intitulé « l’entretien au tableau blanc est une compétence discrète, tout comme être capable de se rappeler Pi à un millier de décimales ».
Et d’expliquer que ce processus « refroidit de nombreuses personnes qui sont sous-représentées dans le domaine du développement de logiciels ». « Si vous êtes occupés à travailler et à élever des enfants, vous voulez passer autant de temps que possible à apprendre à coder et non effectuer des mémorisations par coeur qui n'auront aucune importance une fois que vous aurez commencé votre travail ».
Il arrive que les développeurs passent des jours, voire des semaines entières à se préparer à cette épreuve, motivés en partie par la peur d’être interrogés sur un algorithme qu’ils n’ont pas étudié ou qu’ils ne maîtrisent pas. « Une petite industrie a émergé qui nous rappelle le mal-être de la préparation au SAT », a expliqué Karla Monterroso, vice-président des programmes pour Code2040, une organisation pour les techniciens noirs et latinos, dans une critique de l'entrevue du tableau blanc. « Un individu peut dépenser des milliers de dollars à apprendre les normes culturelles nécessaires pour se mettre dans un bureau d'une entreprise de technologie ».
En décembre, Aline Lerner, l'un des fondateurs de Interviewing.io, un service qui permet aux développeurs de se préparer par la pratique pour des entretiens techniques et effectue même des entretiens anonymement pour certaines entreprises, a écrit un billet de blog intitulé « vous ne pouvez pas améliorer la diversité dans la technologie sans corriger l’entretien technique ».
« Après avoir tiré des données de milliers d'entretiens techniques, il est devenu clair pour nous que l'entretien technique est un processus dont les résultats sont non déterministes et souvent arbitraires », a-t-elle écrit. « Nous croyons que l'entretien technique est un processus brisé pour tout le monde, mais que les défauts dans le système ont encore plus de répercussions sur les groupes sous-représentés ».
Certaines entreprises, comme Foursquare, ont déjà abandonné l'entretien sur le tableau blanc.
Source : l'entretien technique est brisé, billet David Hansson, tweet David Hansson, billet Quincy Larson, tweet Tim Dierks, billet Aline Lerner, Foursquare
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Des développeurs avouent leurs « péchés » de programmation
Pour s'ériger contre un processus d'entretien technique qu'ils estiment brisé
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Le , par Stéphane le calme
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