Après le résultat des élections présidentielles américaines, un doigt accusateur a été pointé vers les réseaux sociaux qui ont été utilisés pour diffuser largement de « fausses actualités ». Selon les plaignants, lesdites fausses actualités ont contribué à mener Donald Trump à la victoire. Une conclusion qui a soulevé une polémique. Toutefois, pour Mark Zuckerberg, « l’idée que Facebook ait influencé l’élection de la moindre manière à cause de ses faux articles d’actualité, qui représentent une partie infime de notre contenu, me paraît ridicule ».
Pour le New York Times, le problème de l'influence de Facebook sur le discours politique ne se limite pas à la diffusion de fausses actualités, mais aussi à l’utilisation de cette plateforme comme chambre à écho. L'algorithme de l'entreprise choisit les publications qui apparaissent plus haut dans les flux d'actualité des utilisateurs, de même pour celles qui sont plus bas. « Les humains ont déjà tendance à se regrouper parmi les personnes partageant les mêmes idées et à chercher des actualités qui confirment leurs préjugés », avance le New York Times qui continue en disant que « les recherches de Facebook montrent que l'algorithme de l'entreprise encourage cet aspect en priorisant un peu les publications que les utilisateurs trouvent réconfortantes ».
Si les différentes plateformes ont déjà amorcé le combat pour endiguer le problème des fausses actualités, les entreprises ont tout de même reconnu qu’y parvenir ne sera pas aisé. Facebook a choisi de solliciter des organisations spécialisées dans le fact-checking. Le mois dernier, le réseau social a commencé à tester sa solution aux États-Unis, en promettant un déploiement dans d’autres pays. Le choix du réseau social pour la prochaine destination pour tester son outil s’est porté sur l’Allemagne.
L’Allemagne fait partie des pays qui prennent très au sérieux le problème de la désinformation et son éventuelle influence sur ses élections. Alors que les élections générales approchent à grands pas, Berlin a accusé Moscou de vouloir s’y inviter, comme la Russie l’aurait fait pour les États-Unis. D’ailleurs, la semaine dernière, un rapport du Bureau d’évaluation de la technologie du gouvernement fédéral allemand a prévenu que les « bots sociaux » pourraient miner la confiance dans la démocratie allemande. Notons que Facebook assure que sa plateforme ne compte aucun bot social grâce à sa politique qui invite à lui présenter son identité réelle ainsi que l'interdiction de créer de faux profils.
Selon le Berliner Morgenpost, plusieurs commissions parlementaires vont discuter du rapport cette semaine. Der Spiegel a rapporté que les ministres de la Justice des gouvernements régionaux de Hesse, de Saxe-Anhalt et de Bavière veulent s’appuyer sur le droit pénal pour contrer cette situation : ils voudraient modifier un projet de loi déjà controversé qui vise à criminaliser « de façon tentaculaire » le fonctionnement des botnets. Ce projet de loi a été jugé inadapté par certains médias allemands spécialisés qui estiment que des victimes pourront en faire les frais.
Pour Simon Hegelich, professeur de sciences politiques à l'Université technique de Munich, l'initiative qui en résulte est incohérente, mais pas sans « quelques bonnes idées ». Il estime que l'objectif principal ici est d'aider à forcer les grands réseaux sociaux à réprimer le problème eux-mêmes.
« Nous devons penser stratégiquement à ces propositions », a-t-il déclaré. « Je ne pense pas qu'elles aient été élaborées pour être mises en œuvre exactement comme elles le sont maintenant. C'est un geste stratégique pour montrer très clairement que nos politiciens se soucient de ces sujets et que les plateformes de médias sociaux doivent réagir, vous devrez faire face à des décisions politiques inconfortables ».
Les réseaux sociaux ont déjà eu des difficultés en Allemagne au cours des dernières années, principalement en ce qui concerne le traitement des propos haineux illégaux. Sous la pression du gouvernement, il n'était pas surprenant que Facebook ce mois-ci ait fait de l'Allemagne le deuxième pays après les États-Unis à bénéficier de son nouveau programme de fact-checking. Actuellement en phase de test, le système fait appel à des organismes de fast checking, partenaires bénévoles, tel que le service de journalisme d'investigation Correctiv dans le cas de l'Allemagne, pour faire le suivi des préoccupations des utilisateurs concernant la promotion de fausses actualités.
Un porte-parole du gouvernement fédéral allemand a déclaré que la question de la législation sur les bots sociaux fait actuellement l'objet d'une analyse. Cependant, il s’est abstenu de commenter cette initiative au niveau de l'État.
De nouvelles lois sont-elles nécessaires, voire pratiques ? Hegelich a noté qu'il est déjà illégal de diffuser des canulars dangereux en Allemagne et a souligné que la question des « fausses actualités » est entravée par de mauvaises définitions. « Même en tant que scientifiques, nous n'avons pas les bonnes catégories. Nous sommes tous presque aveugles dans ce sujet », a-t-il reconnu.
Cependant, il a suggéré que ce genre de désinformation pourrait ne pas être aussi efficace en Allemagne de toute façon : « je ne pense pas que la situation en Allemagne soit comparable à celle des États-Unis parce que la société allemande est beaucoup moins polarisée (...). Il est très difficile de changer les opinions des gens sur la politique via les médias sociaux ou n'importe quel type de média, donc l'effet sera probablement moins ressenti ici ».
Source : rapport du Bureau d’évaluation de la technologie (au format PDF), Der Spiegel, Berliner Morgenpost, détails sur quelques points de ce projet de loi
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Fausses actualités : des politiciens en Allemagne voudraient durcir un projet de loi controversé autour des botnets
Pour endiguer leur propagation
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Le , par Stéphane le calme
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