Avec la multiplication des scandales qui impliquent des programmeurs qui ont agi sans éthique de travail ou hors du champ de la loi, beaucoup commencent à se demander ce qu’il faudrait faire pour changer la donne. Que devraient faire les programmeurs quand on leur demande d’accomplir des tâches non éthiques ou illégales ? Qu’est ce qu’il faudrait faire pour protéger le programmeur dans ces cas ? Et faudrait-il prévoir des formations d’éthique pour éviter des agissements contraires à la loi dans le futur ? Bref, une panoplie de questions qui hantent les programmeurs de tous les coins du globe.
Bill Sourour fait partie de ces programmeurs, la semaine dernière, il avait publié un article nommé “Le code qui me fait encore honte”. Il raconte une terrible histoire qui remonte à ses débuts en tant que programmeur quand il était encore jeune. En développant un site web pour le compte d’une entreprise, on lui avait demandé de contourner les lois de publicité des médicaments afin de persuader les jeunes femmes de prendre un médicament spécifique. Il a découvert plus tard que ce médicament causait une aggravation de la dépression et qu’au moins une jeune femme s’est suicidée après l’avoir pris. Il a même découvert que sa sœur prenait ce même médicament et l’a vite alertée. Des décennies après cet incident, Bill est toujours hanté par l’idée qu’il a été responsable dans cette affaire.
Avant de publier son article, Bill a été inspiré par Robert Martin dans son talk “Le futur de la programmation”. Il clame que les programmeurs devraient chercher comment se réguler eux-mêmes et rapidement. « Et si on se décide sur ce que signifie d’être programmeur » se demande Martin. « La civilisation dépend de nous. La civilisation ne comprend pas encore ce fait ».
En effet, de nos jours, toutes nos actions quotidiennes impliquent des programmeurs, du simple fait de passer un appel sur téléphone au pilotage des avions de ligne. En conséquence, des gens ont été tués dans des accidents de voiture en raison de bogues de logiciels alors que d’autres ont péri dans des crashs d’avions pour la même raison. « Nous sommes en train de tuer des gens », a dit Martin. « Nous ne sommes pas là pour tuer des gens, et les choses continuent à empirer ».
Pour Martin, les développeurs sont appelés à faire face à des enjeux cruciaux dans les années à venir. Il a par ailleurs cité le cas de Michael Horn, PDG de Volkswagen America. Ce dernier a blâmé en premier lieu les programmeurs pour le scandale des émissions truquées du géant allemand durant une séance d'audition au Congrès américain. Il a prétendu qu’ils ont agi à leur gré sans préciser une raison particulière. Plus tard, les enquêteurs américains ont accusé la firme d’avoir pris cette décision du haut de la hiérarchie et d'avoir essayé de camoufler cette tricherie. Mais Martin ne cherche pas pour autant à innocenter les programmeurs. « Ce qui est bizarre, c’est que ce sont les programmeurs qui ont écrit ce code. C’était nous, des programmeurs qui ont triché. Pensez-vous qu’ils avaient su ? Je pense que oui, probablement. »
Avant de terminer son intervention, Martin a tenu à rappeler qu’avec ces pratiques non contrôlées, un programmeur va finir un jour par causer un désastre, tuant au passage des dizaines de milliers de gens. Et ce n’est pas seulement la vie des gens qui est en jeu ici ou la pollution par les émissions de gaz seulement ; les mêmes fourberies ont été déjà utilisées dans Wall Street pour manipuler les prix des actions.
Les programmeurs racontent
L’article viral de Sourour a poussé d’autres programmeurs à partager leur histoire à leur tour sur les solutions et les codes non éthiques et parfois illégaux qu’ils ont dû mettre en place pour leurs employeurs. Un programmeur a dû développer une solution qui enregistrait les gens dans la newsletter de son entreprise même s’ils avaient opté pour ne pas recevoir d’emails (ce qui est une violation de la loi fédérale américaine). Ensuite, d’autres programmeurs ont écrit des scripts pour aider les commerciaux de l’entreprise à traquer ces gens. Quand ce programmeur a rappelé au CTO que cette pratique n’est pas éthique, on lui a demandé de se retirer. Selon lui, les autres programmeurs travaillent aujourd’hui pour des startups qui récoltent de vastes volumes de données sur la localisation des gens.
Un autre programmeur qui a travaillé pour une entreprise moyenne a dû développer un outil pour traquer les horaires de travail des employés. Cet individu raconte que son outil pouvait réduire potentiellement le temps de travail des employés au bénéfice de l’employeur en enlevant 15 minutes à chaque connexion (si vous arriviez à 9:01, le système notait alors que vous aviez commencé à 9:15. Si vous partiez à 5:14, il enregistrait 5:00). Le programmeur dans l’embarras a demandé au manageur du projet si c’était illégal et a même essayé de faire des recherches là-dessus. Le management lui a assuré que c’était tout à fait légal et que ça avait été planifié avec le service des ressources humaines.
Dans la plupart de ces histoires, si le programmeur s’oppose aux requêtes de l’employeur, l’entreprise peut toujours recourir aux services d’une autre personne. Mais Martin rappelle que ça reste encore un pouvoir qui donne une marge de manœuvre aux programmeurs et leur permet de s’imposer puisque ce sont eux qui ont le pouvoir aujourd’hui. La solution à ce dilemme est de donner des cours d’éthique, une chose qui est déjà en vigueur dans les formations formelles. Mais malheureusement, la plupart des programmeurs aujourd’hui ont suivi le chemin de l’autoformation. Selon Sorour, cette voie inclut rarement une formation solide sur les pratiques de l’éthique. L’essentiel aujourd’hui est de former le plus de gens possible à écrire du code pour répondre aux besoins grandissants du marché du travail.
Martin et Sorour croient tous les deux que les programmeurs ont besoin d’une organisation pour réguler leur profession comme les autres industries. Actuellement, elle n’existe pas malgré quelques efforts de l’Association for Computer Machinery et l’IEEE qui ont publié des documents d’éthique et proposent quelques fois des formations.
Source : Business Insider
Et vous ?
Qu'en pensez-vous ?
Des programmeurs avouent avoir écrit du code non éthique et parfois illégal
En raison des requêtes de plus en plus contraignantes de leurs employeurs
Des programmeurs avouent avoir écrit du code non éthique et parfois illégal
En raison des requêtes de plus en plus contraignantes de leurs employeurs
Le , par Coriolan
54 % | ||
14 % | ||
10 % | ||
8 % | ||
6 % | ||
8 % |
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !