
d'après Jim Killock, directeur de Open Rights Group
Le Royaume-Uni vient de passer une loi agrandissant ses moyens en matière de surveillance de masse que les associations de défense des libertés jugent « terrifiante » et « dangereuse ». Baptisée Investigatory Powers Bill (IPB) mais aussi « la charte des snoopers », cette loi a été proposée en 2012 par Theresa May, le premier ministre qui était alors secrétaire d'État à l'Intérieur. Quatre ans plus tard, le projet de loi a été finalisé et voté ce mercredi par les deux chambres parlementaires. Ce qui ne s’est pas fait sans critiques émanant des défenseurs des libertés, expliquant que la loi permettra au gouvernement britannique de « documenter tout ce que nous faisons en ligne ».
Lundi dernier, avant le vote de mercredi, Open Democracy a affirmé que « certains des pouvoirs du projet de loi sont profondément intrusifs, et avec le moins de justification possible. Chacun d'entre nous veut être en sécurité, protégé des terroristes et autres - mais la preuve que ces pouvoirs sont tous nécessaires est mince. Cependant, le coût sur notre vie privée est énorme.
Par exemple, un pouvoir que l'État n'a jamais eu avant consiste d'exiger qu'un journal de chaque site web sur lesquels nous nous rendons soit conservé pendant une année. Votre historique de navigation stockée, au cas où il est toujours utile. Si vous choisissez de visiter un site Web de soutien de la dépression, voudriez-vous que cela soit désormais enregistré, révélant potentiellement votre état de santé mentale? Qu'en est-il d’un site de conseils sur l'avortement ? Un guide du mariage ? Pourquoi l'État doit-il savoir cela à propos de chacun de nous ? ».
La loi va contraindre les fournisseurs d'accès Internet à enregistrer l'historique Web de chaque client en temps réel pour une durée maximale d'un an, historique auquel peuvent accéder de nombreux ministères. Elle va oblige les entreprises à déchiffrer les données à la demande, bien que le gouvernement n'a pas été précis sur la façon exacte dont il pourrait contraindre les entreprises étrangères à le faire. Elle prévoit également que soit communiquée toute nouvelle fonctionnalité de sécurité dans les produits avant leur déploiement.
De plus, la loi donne aux agences de renseignement le droit de pirater les ordinateurs et les dispositifs des citoyens, bien que certaines professions (comme les journalistes et le personnel médical) bénéficient d’une protection. Pour Jim Killock, directeur de Open Rights Group, il s’agit là de « la loi de surveillance la plus extrême jamais passée dans un pays démocratique ».
Julian Huppert, l'ancien député libéral démocrate qui a perdu son siège à Cambridge lors de l'élection générale de l'année dernière, a critiqué les partis conservateurs et les partis ouvriers pour s'être unis afin de faire adopter cette loi. Il n'a pas manqué de saluer ceux qui ont voulu en combattre les dommages potentiels. Jenny Jones, membre du Parti Vert de la Chambre des Lords, a affirmé que le Parlement avait « donné à nos services de sécurité des pouvoirs sans précédent pour nous espionner ».

Il existe toutefois des garanties, comme le système de « double verrouillage », pour que le secrétaire d'État et un commissaire judiciaire indépendant conviennent d'une décision d'exécuter des mandats de perquisition. De plus, un nouveau commissaire aux pouvoirs d'enquête va également superviser l'utilisation de ces pouvoirs.
Face aux critiques pendant l’élaboration, le gouvernement a soutenu que le projet de loi n'est pas radicalement nouveau, mais qu’il s’agit plutôt d’un remaniement d’une loi périmée sur la réglementation des enquêtes (RIPA). Cette loi a été promulguée en 2000 pour « légitimer » de nouveaux pouvoirs qui ont été octroyés ou utilisés en secret, comme la collecte de données en vrac et le piratage de réseaux, et qui ont été révélé lors de l'affaire Edward Snowden. La loi sera ratifiée par sanction royale dans les prochaines semaines.

Source : The Inquirer, Open Democracy
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